Jour 2
Je commencerais peut être plus par la nuit 1.
…
Je déplie mon sac de couchage tout froid qui parait si fin, je me demande bien comment cette chose pourra me tenir chaud cette nuit. Je me change en mettant quelques couches, (apparemment pas assez) et je me glisse dedans. Ce sac de couchage, on me l’a prêté gentiment avant de partir, il indique 5degrés confort, 0 degré limite. En gros ça veut dire que tu vas avoir froid dans tous les cas haha. Non plus sérieusement, mon sac de couchage n’était clairement pas assez chaud, parce que à ce moment là, je ne le savais pas encore, mais c’est bien en dessous des 0 degrés que le thermomètre descendra.
Avant de m’endormir, je tente de lire quelques lignes du livre que j’avais emmené avec moi, mais j’ai littéralement trop froid aux mains et aux bras. Je décide alors de m’engouffrer dedans, tant pis je lirais dans une autre vie, me dis-je. La chaleur de mon souffle se répands sur ma poitrine, j’essaie de me concentrer là dessus. Au bout d’une heure, je ne trouve toujours pas le sommeil, je ne sais pas si c’est le froid ou la rigidité du matelas sur lequel je suis, ou… les deux. Les heures défilent, j’alterne des phases de somnolence et des phases de réveil, quasiment toute la nuit. La température chute un peu plus au fur et à mesure, sans doute au rythme des étoiles qui scintillent au dessus de nous. Je commence vraiment à faire une fixette sur le froid, je suis littéralement frigorifiée… je me frotte les membres pour me réchauffer, le tout en observant mon ami Marco qui semble dormir paisiblement depuis plusieurs heures. C’est une sensation très difficile à décrire, mais je me sens totalement impuissante face à mon corps qui se refroidit , je suis là , dans une tente, au milieu de la nuit, au milieu de nulle part et je ne peux littéralement rien faire d’autre que d’attendre et d’essayer de me réchauffer comme je peux. Vers 5h, je suis à bout, je décide d’utiliser la couverture de survie que j’avais apporté « juste au cas où ». Je m’enroule dedans et j’arrive à dormir une bonne heure, c’est toujours ça de pris…
Le soleil se lève et je ne peux plus attendre de me lever et de finalement être en mesure de bouger mon corps. Je remarque qu’une fine couche de glace recouvre la tente, ça craque sous mes doigts…
La vue est sublime et me redonne un peu de baume au coeur. La lumière rose orangée du soleil levant nous enveloppe et nous sommes heureux de nous réveiller avec un temps qui semble bien dégagé. Nous mangeons un petit déjeuner léger, à l’aide de notre réchaud : porridge et quelques graines. J’ai encore faim mais je veux économiser ma nourriture.
Soudain, une intense brume s’abat sur nous en seulement quelques minutes, la vue complètement dégagée se boucha littéralement sous nos yeux ébahis. Les pouvoirs de la nature en Islande… ça ne prévient pas. Nous décidons alors de plier bagages rapidement, avant que ça ne dégénère. Le vent se lève, et c’est tout un process pour plier la tente mouillée par la glace sans la salir.
Nous sommes finalement en route pour notre deuxième jour de marche. Si nous allons jusqu’à Torsmórk, nous avons encore deux ou trois jours de marche selon les étapes que l’on prends. Si nous allons jusqu’à Skógar, il faudra compter au moins 5 jours en tout. Pour être honnête, après la première nuit que je viens de passer, je me demande vraiment si je pourrais tenir plus de 5 jours dans le froid comme ça. De plus, aller jusqu’à Skógar nous inciterait à marcher entre deux glaciers pendant deux jours pour finir le Trek. Je me rends compte que je ne suis pas si bien équipée, voir pas du tout en fait … . Au fond j’en ai envie mais je pense que ce serait vraiment inconscient.
Demain est un autre jour, nous verrons bien au bout des 3 jours, pour l’instant nous marchons en direction du prochain refuge qui se trouve à 15km d’ici. Nous partons à travers une brume intense, et une fine pluie qui mine de rien nous mouille complètement après seulement quelques km. Le vent se lève de plus en plus, ce qui rends la randonnée sur les crêtes des montagnes vraiment difficile et dangereuse. Nous ne pouvons littéralement pas voir ce qui nous entoure, et nous manquons probablement des paysages à couper le souffle. Mais là c’est plutôt le vent qui souffle, j’ai l’impression de marcher dans un nuage, à contre courant. Tout est blanc autour de nous. Nous peinons à voir certains balisage et nous essayons de suivre au mieux les traces de pas qui se dessinent devant nous. Je comprends mieux les préventions de la dame avant de partir et pourquoi il est facile de se perdre ici. Le vent devient fou, et je commence un peu à avoir peur. C’est dans ces moments là qu’on se rends compte à quel point on peut être vulnérable dans ces conditions. Je me sens toute petite, et je sens aussi que nous ne sommes rien comparé à la nature quand elle commence à se déchainer.
Nous marchons à côté d’immenses étendues de neige, le glacier n’est pas très loin et nous observons à certains endroits des morceaux de glace d’une épaisseur déconcertante. L’ambiance est frigorifique, et devient clairement angoissante pour ma part. Le dénivelé est pas mal non plus, nous passons notre temps à grimper et descendre de petites montagnes. Ma cape de pluie ne semble pas si étanche, mon manteau est mouillé à l’intérieur… mon pantalon, je n’en parle même pas. Le protège sac de Marco s’envole sous les coups d’une rafale de vent, et son sac finit par prendre l’eau…. pour moi c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Je suis complètement abasourdie par son calme, il me réponds d’un ton paisible « c’est un état de fait, c’est comme ça ». Quand j’y repense aujourd’hui, je rigole tellement, le calme impénétrable de Marco! De mon côté, à ce moment là, je suis au bord de la crise d’angoisse et je sens que je commence à me laisser submerger par mes émotions. La zone de confort n’existe plus. Je commence à imaginer des scénarios catastrophes et c’est clairement le fait de m’imaginer monter la tente et dormir dehors ce soir avec un vent pareils qui m’angoisse le plus.
Après plusieurs heures de marche dans des conditions vraiment difficiles, nous arrivons à un sommet et nous apercevons que la brume commence à se désépaissir. Nous pouvons enfin voir notre premier paysage de la journée, c’est toujours aussi magnifique, complètement différent d’hier. Nous observons un lac au loin et des montagnes vertes à en perdre la vue. La brume persiste légèrement mais le vent se calme un peu, ce qui nous laisse un peu de répit.
Nous arrivons à la première rivière que nous devons traverser. Nous devons mettre nos sandales parce qu’avec le courant et le poids du sac, les pierres feraient trop mal aux pieds et nous risquerions de tomber. Alors, dans une eau à 2 ou 3 degrés, il ne faut pas prendre ça à la légère.
Tout se passe bien, nous arrivons enfin en direction d’un premier refuge, où nous allons nous arrêter pour manger, cette fois ci nous pouvons nous abriter. Une bonne pause pour se remettre de nos émotions. Après une heure à manger chaud et à reposer un peu nos jambes, nous repartons en direction du prochain refuge à quelques km, où nous allons normalement passer la nuit.
Nous arrivons enfin au fameux refuge qui est soi disant réputé pour être bien abrité du vent… mais ceci est un mensonge, rien n’est abrité du vent en Islande, la puissance du vent est partout. Le vent se remets à souffler super fort, et on doit monter la tente… je ne suis pas du tout rassurée.
Nous commençons à monter la tente avec difficulté, le vent s’engouffre dans la toile, je me dis qu’elle va se déchirer ou s’envoler. Je ne me vois pas du tout dormir dehors ce soir, alors portée par mes émotions je pars chercher de l’aide au près de la dame qui s’occupe du refuge. Je lui exprime les larmes aux yeux que je ne suis pas du tout rassurée de dormir dehors avec ce vent, et lui demande désespérée si elle n’aurait pas une autre solution. Etant donné que le refuge est complet, elle me propose d’aller dormir dans une grange qui se trouve à quelques mètres du refuge : « C’est très spartiate, il n’y a pas d’électricité, ni de chauffage, mais vous pouvez y installer vos matelas, au moins vous serez abrités du vent, ça ira? » me dit elle. Le soufflement aigüe du vent dans les fenêtres me souffla la réponse, c’était une évidence, on allait passer la nuit dans cette grange.
Nous nous installons dans la grange et je me sens soulagée, en sécurité ; finalement nous serons plus de 8 personnes à nous blottir contre le plancher de cette vielle grange pour échapper au souffle puissant et constant de la nature. L’ambiance est vraiment sympa, et nous passons la soirée à refaire le monde avec des inconnus à la lueur de quelques bougies.
Nous finissons par nous endormir, épuisés, demain, qui sait, sera sans doute une grosse journée.
La suite dans un prochain épisode ❤
PS : Désolée si certaines photos sont de mauvaises qualité, certaines sont prises avec mon téléphone ! On veut du vrai ! 😉